samedi 24 août 2013

A-t-on encore le droit d'écouter les Ramones en 2013 ?


(Ou : "essayer d'écrire un article pertinent malgré une accroche tirée de GQ et autres Glamour")



Introduction :

Tout jugement personnel mis à part, je suppose que tout comme moi, votre entourage présente nécessairement un ou plusieurs de ces individus. Ces personnes méprisées par d'autres, plus calés en terme de culture musicale, parce qu'elles portent un T-Shirt des Ramones « alors qu'elle ne connaîssent que deux chansons ». Pour reprendre une expression galvaudée avec l'émergence du net en tant que vecteur principal de la culture, ces gens seraient des sortes de « casu » de la musique ; qui se contenteraient d'écouter uniquement les titres les plus connus des groupes les plus grands publics. Dans une sorte d'Inception culturel, comme si se contenter des grands hits étaient un choix, un leitmotiv, une mécanique consciente. 



 Le déchaînement de rage des pseudos puristes d'internet est quasiment annihilé par le recours aux memes - pas très cohérent de critiquer le mainstream alors que 9gag est devenu un des sites les plus grands publics, pas vrai?



En réalité, ce cas est applicable à énormément de groupes, nécessairement antérieurs aux années 2000, trop récentes pour que leurs artistes bénéficient de la même reconnaissance : pensons aux Beatles, aux Rolling Stones, aux Guns N' Roses, à AC/DC de manière plus récente. Cela dit, le T-Shirt Ramones en est probablement le meilleur exemple. A l'image du Tamagotchi du siècle dernier, de l'iPhone il y a quelques années, il en devient quasiment une sorte de marqueur social, un « it stuff » (merci Glamour Mag, vos royalties sont dans la boîte aux lettres) que tout le monde doit avoir. Il s'émancipe presque au fond de son aspect promotionnel, et en finit par ne plus représenter l'intérêt manifesté par son porteur à l'égard du groupe.
A l'image de la diffraction de la lumière au travers d'un prisme, de quatre garçons dans le vent qui traversent une rue ou d'une bouche à la langue proéminente ; le logo qui détourne le sceau présidentiel américain devient une icône qui transcende en quelque sorte son essence de produit merchandising pour devenir le pilier de toute garde-robe « rock » qui se respecte...
Entre parenthèses, le terme rock comme qualificatif passe vraiment mal, on se croirait dans le courrier des lecteurs de Rock N' Folk (jetez y un œil si vous le pouvez, ça vaut le coup). Ainsi, « Etre Rock en 2013 », comme depuis 2004, à la louche, c'est suivre la thématique du pseudo-revival rock en commençant par arborer fièrement ce T-Shirt d'un groupe dont certains, c'est évident, doivent penser que les membres sont 4 frères immigrés Chiliens. 

 "Frodo, don't wear the Tee, I Know it's very tempting"

Dans ce cas, on retrouve le cas du casu musical, ou plutôt le hipster : ce parti pris vestimentaire, qui doit signifier une prise de position, si ce n'est une adhésion du moins une proximité certaine à une sphère se fait ici pour de mauvaises raisons, ou du moins sans réel sens. Sans être réac, c'est vrai que les collections notamment chez H&M de T-Shirt à l'esprit vintage de groupes comme Kiss ou les Stones ont largement contribué à la recrudescence de cet esprit. C'est ce qui pousse certains à porter fièrement un T-Shirt des Beatles parce qu'ils adorent le morceau Imagine, sans comprendre la stupidité d'une telle raison.

C'est ce qui les distingue de ceux qui attachent plus d'importance à la culture et à tout le background du monde de la musique. Le problème, est que souvent on tombe dans l'excès inverse. Par exemple, les groupes les plus connus deviennent en quelque sorte tabous. Comme si désormais, le mainstream devenait honteux. La réflexion est similaire au sein de la discographie d'un groupe, les fans aficionados auront souvent tendance à rejeter les albums les plus connus du groupe pour se tourner vers des opus plus obscurs. Cette réaction serait compréhensible si la réussite commerciale est à attribuer à un changement radical en termes de musique (cf Def Leppard, Metallica, Scorpions ; et même Green Day ! Ecoutez les premiers albums, c'est un groupe radicalement différent de celui qui a chié American Idiot). Mais parfois ce rejet est un automatisme ridicule. C'est un comportement classique quand on aime énormément un groupe qui n'est pas encore très connu de le considérer un peu comme son jardin secret ; et que dès l'instant où ils accèdent à la reconnaissance de la masse, on s'en détourne. Mais les groupes font avant tout de la musique dans le l'optique du succès et de la reconnaissance du public. Un artiste qui dirait le contraire serait soit un menteur soit un hypocrite. L'art, et à plus forte raison, la musique n'existe que parce qu'elle est reçue par un public, parce qu'elle stimule l'intellect et suscite réaction et sentiments. On ne fait pas de l'art pour soi. Un groupe qui reste obscur n'en devient pas automatiquement bien meilleur qu'un groupe ultra-connu. Un groupe connu ne s'est pas nécessairement prostitué pour le devenir.

Alors quoi, sous prétexte que certains « connaisseurs musicaux » de la presse musicale ou d'internet décident que déclarer être fan des Ramones c'est nécessairement ne connaître que 'Blitzkrieg Bop' ou 'Sheena Is a Punk Rocker' ; il faudrait bannir ce groupe de son esprit ? Il faudrait rejeter AC/DC parce que tout le monde connaît Back In Black et que la musique que tout le monde connaît, c'est naze ?


Moralité :Cherchons des groupes de Swedish Fisher Metal qui jouent en accordant des balais avec des moteurs de tondeuses à gazon, c'est vachement moins mainstream, donc vachement mieux que tous ces bouffons qui écoutent encore Led Zeppelin en 2013.

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